Soutenir ce qui nous soutient : faire de l’infrastructure féministe

Par SpiderAlex

Résumé

Nous sommes assises dans AnarchaServer notre serveur féministe (AS). Elle existe dans un espace d’environ 12 m2 réhabilité il y a 4 ans, dans une communauté nommée Calafou en Catalogne, et dans des machines virtuelles installées dans des serveurs physiques localisés dans plusieurs pays. Sa manifestation physique inclut des références aux personnes qui s’y connectent, ainsi qu’aux contenus et services qu’elle sert. De la même façon, si elle héberge une réunion, résidence ou concert, ceux-ci apparaissent dans ses contenus en ligne.

AS est une entité hybride qui existe en ligne et hors ligne. Elle héberge, car on peut y dormir et y travailler, et parce qu’elle prend soin des contenus et des services qu’elle offre aux habitantes et personnes qui lui rendent visite. Elle documente, archive et crée de la mémoire sur des sujets qui lui tiennent à cœur. AS est un des nombreux exemples de ce que nous entendons par infrastructure féministe (infrafem).

Dans cet article, nous nous centrerons sur l’infrastructure féministe créatrice d’outils, de technologies et d’espaces sûrs dont nous avons besoin pour informer, communiquer, documenter, créer des liens, nous mettre en relation, explorer nos identités et inventer des récits et des imaginaires subversifs et radicaux. Pour mener à bien cette exploration, nous laisserons de côté les séparations entre « online » et « offline », « virtuel » et « réel », « artificiel » et « naturel », afin de comprendre comment ces dimensions sont co-construitent dans un continuum, dans une relation de réciprocité, entre impacts et interactions constantes. Nous analyserons l’infrastructure féministe et ses liens avec les techniques pour la vie et les technologies appropriées, puis nous nous pencherons sur l’Internet féministe et les serveurs féministes afin de mieux la délimiter. Nous conclurons avec une série de questions et de lignes de tension pour continuer à approfondir, et ainsi renforcer, notre compréhension de l’infrastructure féministe.

<> Infrafem <> Techniques pour la vie <> Technologies appropriées <> Infrafem <> Techniques pour la vie <>

Nous aborderons dans cette section la contribution des féministes au développement de technologies et de techniques libératrices, pierre angulaire dans la construction de l’infrastructure féministe qui nous intéresse. La HerStory (plutôt que History) nous indique comment de nombreuses techniques et de technologies de la vie quotidienne ont été conçues par des réseaux de femmes anonymes. Elles ont toujours été là, développant des technologies appropriées (sans contamination, ni soustraction), des technologies « lentes », des technologies ancestrales, des technologies « mineures » et des technologies libres.

Les femmes ont été porteuses et garantes du partage et de l’évolution des connaissances sur les techniques au sein des communautés. Comme le rappelle Margarita Padilla, « [l]a lutte pour la souveraineté fonctionne avec des communautés. Personne n’invente, ne fabrique ou ne programme seul, simplement parce que la tâche est telle que cela serait impossible » (2018, § 14). Sans aucun doute, lorsqu’on regarde de près le panorama de la souveraineté technologique, des technologies appropriées, des techniques libératrices et des infrastructures féministes, on trouve de nombreuses femmes et personnes LGBTIQ+ au sein des communautés qui les mettent en œuvre et les soutiennent.

Qu’est-ce qui marque la ligne sensible différenciant les techniques des technologies et pourquoi cela est-il important pour l’infrastructure féministe ? Selon Biagini et Carnino :

la technique est à la fois un savoir-faire et des outils, c’est-à-dire un ensemble de processus informels et leur sédimentation instrumentale dans les objets produits par les artisans […]. La technologie est un ensemble de processus macro-techniques (c’est-à-dire des processus plus vastes que l’être humain et la communauté d’un village) qui sont rendus possibles par l’alliance de la science et de la technologie. (2010, § n.d.)

Ainsi, la technique peut être non technologique, mais la technologie est basée sur l’absorption de techniques. Dans la systématisation induite par la production de technologies, les techniques pour la vie peuvent être ignorées ou complètement détruites. Ce sont celles qui nous offrent d’autres façons de penser notre relation avec l’environnement et les valeurs que nous projetons dans cette relation.

Biagini et Carnino nous fournissent un autre élément central de réflexion en indiquant ce qui suit :

Selon Wigney, le monde antique a continué à produire des faits relatifs plutôt qu’absolus parce qu’il était basé sur des connaissances essentiellement situées et diflïciles à transférer ailleurs. L’industrialisation et son corollaire, la prolétarisation définie comme une dépossession artisanale, n’ont été possibles à grande échelle qu’avec l’aide de la science en développement. Cette science, loin d’être spéculative, est profondément ancrée dans la réalité : c’est un fait. (2010, § n.d.)

Cette phrase nous montre le potentiel offert par les pratiques spéculatives afin de récupérer les techniques pour la vie et nous conduire vers des technologies appropriées au service de nos communautés. Dans le situé et le spéculatif, nous trouvons un moyen de nous débarrasser du mythe de la science et du progrès technologique. Cette technologie se définit avant tout comme une politique de rapidité et de rupture (move fast and break things). Très peu participent à son rêve, à sa conception, à sa décision, mais nous sommes toutes exposées aux effets de sa mise en œuvre. Elle ne laisse aucune place pour une conception spéculative collective des techniques et des technologies dont nous avons besoin et que nous méritons. La science moderne et les « nouvelles » technologies sont basées sur la mise à distance, l’annulation ou l’absorption des techniques nécessaires à la vie et nous empêchent de trouver les étapes, les raccourcis et les chemins vers nos technologies appropriées.

Selon un article d’Elleflâne :

[une] technologie adéquate est également appropriée, copiée, obtenue. […] et elle décrit la technologie qui est la mieux adaptée au contexte environnemental, culturel et économique. […] Elle nécessite peu de ressources, est peu coûteuse, a un faible impact sur l’environnement, ne nécessite pas de niveaux élevés de maintenance. […] Elle est générée avec des compétences, des outils et des matériaux locaux et elle peut être réparée, modifiée et transformée localement. [.] Après tout, quelle communauté n’a pas besoin d’une technologie qui soit eflïcace, comprise et adaptée à son propre contexte? (2018)

Dans cette compréhension et construction d’une relation de consentement entre les communautés et leurs technologies appropriées, nous trouvons les clés d’une infrastructure féministe qui soutient la régénération des écosystèmes. Comme si elles reposaient sur des processus d’autoproduction et d’autopoïèse, ces infrastructures féministes se nourrissent de nos idées, de nos souvenirs, de nos récits, de nos histoires, de nos fables et de nos désirs.

L’infrastructure féministe se trouve, le plus souvent, cachée sous la structure et dissimulée sur les côtés. Elle est souvent précaire, volontaire et difficile à voir. Mais elle est aussi étendue, distribuée, et elle place en son centre la valeur et l’affection que les personnes, les machines et les écosystèmes qui la composent s’offrent les uns aux autres.

Ce qui nous soutient est le plus souvent invisible

Le terme « infrastructure » combine les mots « structure » et « infra » qui signifie « en dessous ». Une autre définition du terme nous surprend par son caractère vague : « Les installations qui constituent la base de toute opération ou système » (Harper s.d., n.d.). Le concept d’infrastructure semble difficile à cerner et définir. La versatilité du terme le rend d’autant plus évanescent, puisque l’infrastructure peut exister dans des dimensions aussi variées que les ponts et chaussées, l’architecture, les systèmes de gestion d’énergies, la souveraineté nationale, le génie civil et militaire, les habitudes et pratiques sociales, les réseaux d’appui et de solidarité, ou encore l’infrastructure informatique.

L’infrastructure semble, en tous les cas, faire référence à ce qui est difficilement visible, ou ce que l’on rend peu visible, ou ce qui n’est pas censé être vu. On a donc tendance à ne pas la voir, l’oublier ou l’ignorer. Chacune de ces acceptations peut signifier quelque chose de différent pour l’infrastructure féministe (infrafem), car celle-ci peut vouloir rester peu visible (pour des raisons de sécurité, d’exposition ou d’affinités), ou alors être rendue invisible par des effets de discrimination et/ou d’autocensure qui effacent les contributions des femmes.

Ainsi, s’il n’est pas aisé de cerner et définir ce qui relève de l’infrastructure, on peut se demander s’il existe des moyens pour identifier l’infrafem : comment la trouver, la voir et la nommer? Comment expliquer son modus operandi et ce qui la maintient ? À quoi sert-elle ? Qui soutient-elle ?

Dans le cadre de cet article et du texte l’accompagnant, nous utiliserons une définition large de l’infrafem que nous avons développée il y a un an lors d’une réflexion sur les apports des méthodologies de fiction spéculative au développement d’infrastructure féministe :

Nous entendons par infrastructure féministe tout ce qui soutient et étaye avec des ressources plus ou moins stables, les luttes féministes pour leur développement et leur avancement. Par ressources, nous parlons de techniques, technologies et processus (analogiques, numériques, sociaux). Comme exemple d’infrastructure féministes, nous pouvons citer la construction d’espaces sûrs, les refuges, les bibliothèques, les réseaux de sororité et de confiance, les « whisper lists », les serveurs, les pages jaunes, les répertoires, les bots, les outils de documentation et de mémoire, les encyclopédies, les HerStories, les techniques de vie au sens large, les sorts, les rituels et les exorcismes. L’infrafem inclut également des éléments mobiles, éphémères et transitoires qui peuvent se trouver dans l’infrastructure temporaire consistant en des rencontres, ateliers et fêtes qui nourrissent la confiance, l’affection et le bien-être des féministes. (Spideralex 2019, § 11, traduction)

L’infrastructure féministe existe depuis qu’il y a des mouvements et des collectifs féministes. Elle est une des manifestations et des résultats de la synergie des activités et des interactions entre féministes, et elle sous-tend une systématisation et une circulation des bonnes idées, pratiques et soins qui s’y donnent. Elle s’étend donc aussi aux pratiques féministes avec les techniques et les technologies d’information, communication, documentation et mise en relation. Dans ce qui suit, nous élaborerons sur deux manifestations du concept d’infrafem, soit l’Internet féministe et les serveurs féministes.

<> Internet féministe et serveurs féministes <>

L’idée d’une Internet féministe se base sur les principes féministes de l’Internet. Ces principes sont une série de déclarations offrant une perspective de genre et de droits sexuels et reproductifs liés à l’Internet. Ils ont été rédigés lors de la première réunion « Imagine a Feminist Internet » qui a eu lieu en Malaisie en 2014 et qui a été organisée par l’Association pour le progrès des communications (APC). Au total, il existe actuellement 17 principes, organisés en 5 catégories : « Accès », « Mouvements », « Économie », « Expression » et « Incarnation ». Ensemble, ils visent à fournir un cadre permettant aux mouvements de femmes et LGTBIQ+ de pouvoir articuler et explorer les questions liées aux technologies d’information et communication.

Ainsi, une Internet féministe se consacre :

[.] à rendre autonomes de plus en plus de femmes et de personnes queer – dans toutes nos diversités – afin de jouir pleinement de nos droits, de participer à des activités de loisirs et de plaisir et de démanteler le patriarcat. Il convient pour cela de prendre en compte nos différentes réalités, nos divers contextes et spécificités, qu’il s’agisse de l’âge, de handicaps, de sexualités, d’identités ou d’expressions de genre, de statuts socio-économiques, de croyances politiques ou religieuses, d’origines ethniques ou encore de marqueurs raciaux. (APC 2014, § 1)

L’Internet féministe fonctionne comme une aspiration et une feuille de route afin de rendre Internet plus inclusif, sûr et aimable pour toutes les diversités de corps et affects qui l’habitent. De suroit, l’Internet féministe permet de réclamer et se réapproprier son potentiel pour la dissidence et la transformation sociale et politique. En ce sens, on peut créer temporairement, et même de manière stable, de l’Internet féministe au sein de l’Internet commercial, patriarcal, colonialiste et capitaliste actuel. Prenons, par exemple, n’importe quelle création de groupes et conversations féministes autogérées au sein d’Internet. L’Internet féministe qui, heureusement existe déjà, peut se faire au sein d’une infrastructure numérique qui n’est pas féministe, ni dans son développement, ni dans son aspiration. Par sa présence, elle questionne les relations de pouvoir et de division du travail qui y prennent place. Eugenia Siapera nous rappelle en effet que :

[…] dans la concurrence sociale croissante imposée par le capitalisme néolibéral de l’information, la misogynie réapparaît comme un symptôme des luttes pour une nouvelle division du travail. Personne ne peut être sûr de ce qui se passera à l’avenir. Mais la misogynie en ligne et la violence numérique fondée sur le sexe peuvent être considérées comme une version moderne de la misogynie et de la violence contre les femmes dans la période de transition entre féodalisme et capitalisme. Comme le montre Silvia Federicci dans son livre Caliban et la sorcière, on peut trouver de nombreuses analogies entre cette époque et celle que nous vivons aujourd’hui en ligne (2019, traduction paraphrasée).

Ainsi, l’Internet féministe existe, mais il peut se développer en des lieux qui restent inconfortables. C’est comme si on tentait de créer des nouveaux mondes dans un centre commercial duquel on pouvait nous demander de sortir à n’importe quel moment et dans lequel toutes les caméras et droits étaient attribués par défaut à leurs propriétaires. Cela peut se faire et nous le faisons tous les jours, mais cela ne fournit pas le même confort que de se savoir dans une zone autogérée, dans une infrastructure où toutes celles qui l’habitent peuvent jouer un rôle dans sa définition, forme, maintenance et gouvernance.

Dans un autre sens, l’Internet féministe inclut aussi les serveurs féministes, la deuxième manifestation sur laquelle nous nous pencherons. Les serveurs féministes ont été un sujet de discussion et un ensemble de pratiques techno-politiques développés par des réseaux et groupes de cyberféministes et transféministes intéressées dans la création d’une infrastructure communicationnelle plus autonome. Elles veulent que les données, le contenu et la mémoire des groupes féministes soient facilement accessibles, préservés et gérés. Cela fait en sorte de gagner en autonomie dans l’accès et la gestion de nos données et de nos mémoires collectives. De plus, cela permet de disposer d’outils comme des listes de diffusion, blogs, wikis, systèmes de gestion de contenu, réseaux sociaux ou tout autre service, logiciel et contenu nécessaires aux luttes féministes.

Il s’agit aussi, bien sûr, de reconnaître que les environnements technologiques nécessitent plus de femmes, de personnes racisées et de diversité culturelle en général. Pour atteindre ces objectifs, les serveurs féministes se posent les questions suivantes : quels sont les objectifs d’un serveur féministe ? Qu’est-ce qui rend un serveur autonome et féministe? Quels sont les modèles (socialement durables) possibles pour ces serveurs? Comment instaurer un climat de confiance mutuelle pour développer des approches coopératives de gestion de ces espaces de résistance et de transformation ? De quoi sont faites nos technologies féministes ? Comment les rêver et les incarner ?

Actuellement, il existe une dizaine de serveurs féministes en fonction à travers le monde, principalement en Amérique latine et en Europe. Certains de ces serveurs constituent de véritables terrains d’expérimentation pour leurs membres qui y apprennent, avec d’autres féministes, la gestion de serveurs. D’autres serveurs ont la vocation de fournir des services et de l’hébergement ainsi que de pourvoir à la subsistance de leurs contributrices afin qu’elles puissent gagner leur vie en administrant des serveurs. La question du modèle économique idéal est une question encore ouverte qui devra être explorée et requestionnée par les mouvements et fonds féministes.

Avec l’exemple des serveurs féministes, nous réalisons que le concept d’infrastructure féministe ne peut se réduire au concept d’Internet féministe, car il est plus vaste et concerne d’autres espaces et technologies en dehors d’Internet. L’infrafem est aussi pensée et développée dans des « feminists clubs only ». Dans ces lieux, elle ne prend pas place dans des infrastructures patriarcales; elle crée sa propre infrastructure. Elle parasite depuis les marges. L’infrafem est notre réponse créative et systémique aux failles de l’infrastructure patriarcale, capitaliste et colonialiste.

Nos perspectives et conditions d’accès, d’utilisation et de développement des technologies sont profondément influencées par la façon dont le patriarcat, le capitalisme et le colonialisme sont ancrés dans notre vie quotidienne et dans les sociétés dans lesquelles nous vivons. La création d’une infrastructure féministe nous donne des réponses et de la valeur. Penser à la diversité de nos contributions et de nos actions nous permet d’ouvrir de nouveaux horizons d’action politique, des processus de réparation, et de modeler d’autres possibilités pour nous toutes.

Nous devons développer des méthodologies pour identifier les processus qui créent de l’infrafem. En plus il s’agit d’approfondir les liens avec des techniques et des technologies libératrices, conçues pour la vie et non sa destruction. La protection de la vie et la mise en son centre des soins contre l’extractivisme constituent des tensions qui traversent tout le champ d’action des infrafems.

Pour repenser nos trajectoires et nos mémoires collectives avec les technologies, pour pouvoir les raconter et les voir, nous devons examiner les mouvements collectifs des communautés impliquées dans la création de leurs propres techniques et technologies libératrices. Il nous faut écrire la HerStory de l’infrafem dans toute sa diversité, depuis les lignes d’attention (helplines) et les réseaux de sororité aux formes extrêmement variées, jusqu’à la création de ressources utiles par les féministes, en passant par le développement de systèmes pour loger nos données, des protocoles Internet, des bots et des intelligences artificielles (IA). En attendant de pouvoir documenter ces HerStories, nous proposons, à titre de conclusion, de repenser à nos infrastructures féministes à partir des points de tension qui les traversent.

Lignes de tension

L’infrastructure communautaire et l’infrastructure féministe ont des points en commun, mais aussi des divergences. Les deux types d’infrastructures sont basés sur des processus spéculatifs de création et peuvent exploser, éclater et disparaître rapidement. L’infrastructure nécessite donc d’être pensée, développée et maintenue. Il est plus aisé de développer que de maintenir. L’infrastructure communautaire et l’infrafem doivent se poser la question de la maintenance et de l’asservissement par leur propre infrastructure.

L’infrafem se base sur des techniques pour la vie et elle implique des technologies qui permettent de systématiser/fixer certains processus. Elle existe dans des écosystèmes qui ont besoin d’être documentés, communiqués et partagés pour exister. Leur tendance à systématiser/sédimenter certains processus, absorbant des techniques pour la vie pour en faire des technologies appropriées et consenties est une autre de ses particularités. L’infrafem oriente les besoins/actions vers certaines ressources destinées à les couvrir, générant souvent des effets que nous ne savons pas encore lire et interpréter.

Les infrastructures féministes ont tendance à (re)générer et à (ac)cumuler, et l’alchimie qui résulte de cette tension doit être revue périodiquement afin de les arroser/alimenter au bon moment. Trop souvent l’infrafem devient visible quand elle cesse de fonctionner ou quand elle disparaît. Comment établir des politiques de visibilité préventives qui participent à sa maintenance pour qu’elle ne disparaisse pas ? Finalement, les infrastructures sont toujours instables, en phase bêta perpétuelle, elles nous font toujours osciller entre « gagner » en autonomie et ne pas « perdre » en indépendance (et donc ne pas devenir trop dépendante de cette infrastructure). Elles posent donc en elles-mêmes des questions ouvertes sur la façon dont nous pouvons continuer à les utiliser ou vivre sans elles.

 

Biographie

Spideralex est sociologue et docteure en économie sociale. Elle est fondatrice d’un collectif cyberféministe catalan appelé Donestech qui explore la relation entre le genre et les technologies par la recherche-action, les documentaires et les formations. Elle est l’éditrice de deux volumes sur la souveraineté technologique parus chez Ritimo.

 

Références

APC. 2014. « Principes Féministes de l’Internet ». https://feministinternet.org/sites/default/files/french_fpis.pdf

Biagini, Cedric et Carnino, Guillaume. 2010. « On arrête parfois le progrès », dans : C. Biagini et G. Carnino (dir.), Les luddites en France : Résistances à l’industrialisation et à l’information, pp. 5-59. Paris : L’échappée.

Elleflâne. 2018. « Des technologies appropriées aux technologies réappropriées », dans La Souveraineté technologique, Vol. 2. https://sobtec.gitbooks.io/sobtec2/content/fr/content/07rats.html

Harper, Douglas. s.d. « Infrastructure », Online Etymology Dictionary. http://dictionary.reference.com/ browse/infrastructure

Padilla, Margarita. 2018. « Souveraineté technologique, de quoi parle-t-on ? », dans La Souveraineté technologique, Vol. 2. https://sobtec.gitbooks.io/sobtec2/content/fr/content/01preface.html

Siapera, Eugenia. 2019. « Online Misogyny as Witch Hunt: Primitive Accumulation in the Age of Technocapitalism », dans : D. Ging et E. Siapera (Dir.), Gender Hate Online: Understanding the new Anti- Feminism, pp. 21-43. New York: Palgrave Macmillan.

Spideralex. 2019. « Underneath and on the sidelines: Sustaining feminist infrastructures using speculative fiction. » https://iterations.space/uploads/iterations-spideralex-underneath-and-on-the-sidelines.pdf https://iterations.space/uploads/iterations-spideralex-underneath-and-on-the-sidelines.pdf